Mar. 03 Mai 2011, 10:00
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Citation :Les mystères insolites des boyaux de Paris
Lâentrée, un trou à peine assez large pour laisser passer un adulte, doit impérativement rester secrète. Equipé dâune lampe frontale, de vêtements qui ne craignent rien et de quelques biscuits secs, il faut tenter de suivre vaillamment le guide, sous peine de se perdre. La progression dans le tunnel creusé dans la roche nâest pas malaisée, mais mieux vaut être petit. Sur le sol stagne une eau apparemment claire. Renseignement pris, elle provient, par inï¬ltration, des égouts, situés juste au-dessus.
Nombreux sont les Parisiens qui ont, au moins une fois dans leur vie, effectué une excursion, insolite et illégale, dans les «catacombes» de la capitale. Le terme, qui évoque un cimetière, est impropre. Il sâagit en réalité dâun réseau de carrières souterraines dâo๠étaient autrefois extraites les pierres destinées aux immeubles. Ce véritable labyrinthe de galeries et de salles, qui sâétend principalement sous les arrondissements de la rive gauche et la banlieue sud de la capitale, ne doit pas être confondu avec les catacombes «ofï¬cielles», lâossuaire municipal accessible à Denfert-Rochereau et que la ville fait parcourir chaque année à plus de 200 000 personnes. (<!-- m --><a class="postlink" href="http://www.catacombes-de-paris.fr">http://www.catacombes-de-paris.fr</a><!-- m --> ; 01 43 22 47 63)
Les carrières attireraient quant à elles, environ 10 000 visiteurs par an, des «touristes» dâun soir, mais aussi des «cataphiles», ainsi quâils se nomment, fêtards, tagueurs, passionnés de spéléologie ou amateurs ayant minutieusement cartographié lâenchevêtrement souterrain. Le réseau a une longue histoire. On y a brassé de la bière, exposé des Åuvres dâart, caché des fugitifs. Pendant lâOccupation, résistants et soldats allemands se poursuivaient dans les galeries. Aujourdâhui encore, on y lit, trente mètres sous terre, les mêmes plaques des rues quâen surface. Si lâaccès est interdit depuis un arrêté de 1955, câest en raison des multiples dangers, à commencer par le risque dâeffondrement. Les éboulements de terrain, appelés fontis, provoquent des affaissements qui ï¬nissent par fragiliser les fondations des immeubles. Si les catastrophes, comme celle qui ï¬t disparaître six rues à Clamart (92) en 1961, sont devenues rares, quelques effondrements se produisent de temps à autre. Créée par décret royal en 1777, lâInspection générale des carrières (IGC), qui dépend aujourdâhui de la ville de Paris, est chargée de garantir la sécurité des lieux. «Nous consolidons par des travaux de maçonnerie, en installant des piliers ou en renforçant des voà»tes. Parfois, nous injectons des coulis de ciment», détaille Xavier Piccino, adjoint à lâIGC. Ces travaux nâenchantent pas les «cataphiles» qui se livrent littéralement avec les inspecteurs à une «partie de chat et de souris». «Les uns murent un accès, les autres y creusent une chatière», commente un habitué. Une unité de police judiciaire se charge de la partie répressive de la réglementation. Jusquâen 2000, les «cataï¬ics» étaient dirigés par le commandant Jean-Claude Saratte, bien connu des promeneurs du sous-sol, qui maniait autant lâinformation et la prévention que la contravention. «Depuis, câest le répressif pur», se désole René Dutrey, conseiller de Paris (EELV). Lâélu souhaiterait que le réseau «soit géré comme nâimporte quel gouffre de spéléologie, avec des autorisations dâaccès», mais sa proposition nâa rencontré aucun écho, ni à lâHôtel de ville, ni parmi les associations informelles de «cataphiles», ï¬dèle à une certaine culture du secret. â¢
Olivier Razemon